Saturday, March 22, 2008

Le phénomène de la "freak-économie"

voici le texte d'une chronique que j'ai prononcé lors de l'émission Ouvert le samedi sur les ondes de la radio de Radio-Canada, ce matin (le texte prononcé fait foi).

LE PHÉNOMÈNE DE LA FREAK-ÉCONOMIE
Il y a un phénomène qui prends de plus en plus de place chez les économistes : la freak-économie… ou comment la science économique permet d’expliquer nos comportements sociaux de tous les jours… Aujourd’hui j’ai décidé de vous présenter un survol de cette discipline qui a débuté dans les années 1960 avec Gary Becker de l’Université de Chicago qui a gagné un prix Nobel d’économie en 1992. Steven Livett de l’Université Harvard a quant à lui donné le nom courant à ce type de théories économiques en publiant Freakeconomics il y a quelques années.

En ce samedi de Pâques, quoi de mieux pour parler d’économie des comportements sociaux que de commencer par regarder la religion avec la loupe de l’économiste? Je ne suis pas certain que Benoit 16 sera d’accord avec cette vision des choses, mais bon… Alors, qu’est-ce que l’économie a à dire sur la pratique religieuse???


LE MARCHÉ DES RELIGIONS
Le fondateur de la science économique, Adam Smith, en 1791, a été le premier à aborder les religions comme n’importe quel autre « bien » ou organisation, c’est-à-dire en termes d’offre et de demande pour les religions. Il a avancé qu’il y avait un marché des religions et que celles-ci se faisaient concurrence pour obtenir la faveur des ouailles!

Smith est même allé plus loin en appliquant l’analyse des structures de marché aux religions, ce qui lui a fait dire qu’une religion d’État ou en situation de monopole, comme l’Église catholique ou l’Église d’Angleterre (ce sont ses exemples!), auraient tendance à devenir moribondes et non innovantes. Bref, si on lui garanti une certaine affluence et un financement stable, le clergé est tenté de délaisser le « service à la clientèle » pour s’engager dans d’autres activités : la politique, les arts, etc. Tiens donc…

D’autres économistes, comme Barro en 2003, ont tenté d’expliquer la vitalité religieuse américaine par cette théorie du marché des religions. Comme les groupes religieux sont plus nombreux aux États-Unis, la concurrence est plus féroce. Pour garder leurs fidèles, les groupes religieux américains doivent fournir à leurs membres soit des services, soit de nouvelles façons d’exprimer leur foi… publiquement si possible pour en attirer d’autres! D’où les soupes populaires, le support aux familles et aux démunis, la mission d’éducation, etc. Dans la même étude sur un ensemble de pays occidentaux, Barro conclut que le pluralisme religieux encourage la participation des fidèles!

LA RELIGION COMME PLACEMENT
Du point de vue individuel aussi, l’économie a des choses à dire sur la pratique religieuse. En effet, si globalement la participation religieuse peut dépendre des conditions du marché des religions, le choix individuel de participer à une religion peut aussi être influencé par des facteurs « économiques » au sens large.

Par exemple, comme la plupart des religions « vendent » le concept de « vie après la mort », on pourrait croire que les gens qui pratiquent une religion cherchent à « acheter leur ciel ». En termes économiques, ces gens cherchent à maximiser leur bien être dans leurs deux vies : celle-ci et la vie après la mort… Dans ce contexte, la pratique religieuse deviendrait une sorte de placement pour s’assurer une « vie après le mort » qui soit agréable!

Différentes études économiques ont trouvé que la pratique religieuse augmentait avec la foi dans une vie après la mort et avec l’âge… Elles ont également trouvé qu’il y avait plusieurs sortes de substituts religieux : les personnes dont le salaire est bas fréquentent proportionnellement plus les lieux de culte, l’église. Alors que les personnes dont le salaire est plus élevé, donc dont la valeur du temps est grande, fréquentent moins les lieux de culte mais versent plus de contributions en argent! Tous les chemins mènent au paradis!


LA DRAGUE EN LIGNE
Mais trêve de « bon dieuseries »!
Il y a d’autres domaines des comportements sociaux pour lesquels l’économie a quelque chose à dire!

Par exemple, l’existence des sites de rencontre en ligne!

On a remarqué que les membres des sites de rencontre étaient généralement âgés entre 25 et 45 ans, qu’ils étaient en moyenne plus éduqués et qu’ils occupaient un emploi, souvent dans le domaine professionnel… Pourquoi?

Éh bien, ça serait en partie parce que ces caractéristiques sont aussi celle de gens dont la valeur du temps, le coût d’opportunité en termes économiques, est élevée. Le flirt en ligne leur permettrait donc de conclure la « transaction », qui est de trouver un partenaire, plus efficacement que la drague traditionnelle!

Pensez-y… Avec la drague traditionnelle vous devez vous déplacer vers un bar, scruter la faune pour identifier des candidats potentiels, trier les candidats au gré des conversations…

Toutes des activités qui prennent du temps et qui ne se retrouvent pas dans la drague en ligne. Vous pouvez vous connecter de la maison, le moteur de recherche identifie les candidats potentiels à votre place et vous obtenez beaucoup d’information d’un seul clic!

Et remarquez bien que les sites de rencontre s’ajustent en conséquence… ils offrent des outils aux compétiteurs pour se démarquer : membres payants, cadeaux, clin d’oeils… Ils offrent aussi des outils pour juger de la véracité des informations : albums photos, web caméras et… membership payant (signal de richesse…)

LA SEXUALITÉ… VUE PAR UN ÉCONOMISTE!
Alors, comme on a commencé cette chronique très pieusement, avec le sujet de la religion, on va la terminer avec un sujet un peu plus salé! Les mœurs sexuelles revues par les économistes!

Effectivement, Richard Posner, a publié en 1992 Sex and Reason, un traité sur l’économie de la sexualité. Dans son livre, il a parcouru l’Histoire de la sexualité de la Grèce antique à aujourd’hui en essayant d’évaluer l’offre et la demande pour des partenaires sexuels ainsi que les déterminants du marché…

Il a trouvé que la rareté relative des hommes ou des femmes avait un impact sur les pratiques sexuelles d’une époque… notamment parce qu’il existe des substituts à la sexualité traditionnelle.

Par exemple, alors que les femmes grecques étaient enfermées au gynécée, c’est-à-dire pratiquement séquestrées et « sorties du marché », la pratique homosexuelle proliférait.

Un philosophe avec qui je discutais récemment me faisait d’ailleurs remarquer que c’est à Sparte que les relations sexuelles entre femmes étaient les plus courantes dans la Grèce antique… puisque les hommes étaient constamment partis à la guerre.

À d’autres moments de l’histoire, il note que des institutions sont nées pour contrôler l’offre et la demande pour des partenaires. Il prend l’exemple des monastères du Moyen Âge qui sont survenus alors que les jeunes hommes peinaient à se trouver une conjointe puisque la mode était une grande différence d’âge dans les couples…
Dans la même veine, certaines innovations ou certains changements comme la pilule anticonceptionnelle, l’arrivée des femmes sur le marché du travail et les programmes sociaux de soutient aux familles monoparentales réduisent le coût associé à une rupture du couple…

Bref, Posner démontre de façon assez convaincante qu’il y a aussi des comportements de marché derrière notre quête d’un partenaire sexuel et que les pratiques en la matière évoluent au gré de la rareté relative d’un des deux sexes…

CONCLUSION
Évidemment qu’il est déraisonnable de croire que l’économie peut tout expliquer de la religiosité, de la recherche de partenaires et des pratiques sexuelles… Il reste une grande part d’émotion et d’arbitraire dans ces comportements. Mais la science économique peut tout de même contribuer à identifier la part de rationalité qui les guide.

C’est le cas, dans le fond, parce que la rationalité économique est au cœur de chacun d’entre-nous et qu’elle est profondément ancrée dans l’être humain. Avec les exemples qu’on a eu ce matin, je dirais même qu’elle est présente en nous de la tête aux pieds… et même ailleurs!
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Here is the texte (in French) of a presentation I made at Ouvert le samedi, a radio program of the French national radio.

Wednesday, March 05, 2008

Le débat sur les péages s'empare des blogueurs | Debate on tolling is on among blogers

Voici quelques contributions intéressantes sur le débat lancé par l'IEDM sur les péages:

Mon ami (presque) d'enfance, Nicolas Paquin sur Itinéraire facultatif propose de charger les péages en fonction du poids du véhicule (mentionnons qu'effectivement, les poids lourds paieraient plus cher à la fois à cause d'un montant unitaire plus élevé mais également à cause de leur plus grand nombre d'essieu).

Éric Lefrançois sur MonVolant demande quel alternative est possible au péage

Vincent Geloso sur 100 % libéralisé présente deux positions alternatives: le péage (la proposition que j'ai publiée avec l'IEDM cette semaine) et la taxe sur l'essence (dont j'ai traité dans un billet aujourd'hui)

Bryan Breguet sur De gauche à droite et Jean-Sébastien Trudel sur La prochaine évolution industrielle proposent quant à eux d'augmenter la taxe sur l'essence (voir ma réponse sur cette proposition)

Alexis Saint-Gelais sur À mon humble avis fait état d'une proposition allant dans le sens des péages au Congrès des membres du PLQ de cette fin de semaine.

Richard Larose sur Larose en liberté s'oppose aux péages
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I am not aware of any blog debatting on tolling Quebec's road in English. If you know any bloger who wrote on the debate, please let me know and I'll be happy to add it's contribution on this blog.

Suite aux péages (2) | Follow-up on tolling (2)

Je vous invite à lire l'article d'Alain Dubuc dans La Presse de ce matin: "Péages: payer pour quoi?" Il soulève quelques points intéressants de discussion, même si je crois contrairement à lui que la Note économique publiée lundi est une bonne base de discussion.
J'aimerais également revenir sur certaines critiques concernant les positions que j'ai émises sur le retour des péages.
Une de celles-ci veut qu'il serait beaucoup plus efficace et moins difficile d'augmenter la taxe sur l'essence pour financer le réseau routier (Henri Aubin, The Gazette notamment). Cela ne tiens pas la route du point de vue politique. C'est d'abord ce qui a été fait dans les années 1980 avec le résultat qu'on connaît: l'argent a été détourné des routes et utilisé pour l'ensemble des autres missions de l'État.
Du point de vue économique non plus cette idée n'a pas de sens. La taxe sur l'essence est une taxe pigouvienne sur le carbone qui vise à réduire les émissions à effet de serre. Les revenus ainsi générés devraient être utilisés exclusivement à la dépollution causée par l'utilisation de l'essence. Les péages sont un tarif qui servent à financer un service que l'on reçoit. En outre, ils constituent un bon moyen de lutter contre la congestion routière, ce que ne fait pas la taxe sur l'essence. Bref, taxe sur l'essence et péages: deux moyens pour atteindre deux fins fort différentes. Ma conclusion, c'est qu'on doit diminuer la taxe sur l'essence pour qu'elle représente le coût de la dépollution causée par les automobiles (estimés à 350 millions $ comparativement à plus d'un milliard de revenus pour la taxe sur l'essence) et augmenter les péages.
Un autre argument est à l'effet que a) le retour des péages causerait un accroissement de la bureacratie et coûteraient cher à administrer et que b) ils seraient soumis aux mêmes arbitrages politiques que les autres taxes (Jean J. Samson, Le Journal de Québec notamment). Dans les deux cas, ceux qui ont bien lu l'étude publiée lundi ont compris que ces scénarios avaient été prévus. Les montants de revenus publiés ont été diminués de 15 % pour tenir en compte les coûts de perception et de 5 % pour tenir en compte les mauvaises créances. Les revenus de 1,6 milliards qui circulent sont donc des revenus nets et non bruts. Aussi, il est recommandé de procéder au retour des péages en PPP justement pour mettre à l'abri les revenus de la main tentaculaire du gouvernement.
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I would like to come back on a few comments made on the Economic Note I published on monday: "Bringing back tolls on Quebec highways".
On of them is that it would be more efficient and easy to increase the gaz tax to maintain the highway network (Henri Aubin, The Gazette among others). That proposition doesn't make sense politically. Increasing the gaz tax has been done in the 1980's with the desastrous results we now have: revenues has been used to finance all governmental missions, except maintaining roads it seems.
It does not make sens economically either. The gaz tax is a Pigou's tax on carbon: it is aimed to reduce greenhouse gazes. Its revenus should be used exclusively to compensate greenhouse gazes produced by cars. Tolls are a user fee charged to finance a service we receive. In addition, they are a good congestion relief charge and are often used to reduce traffic. Then gaz tax and tolls: two means to attain two very different goals. I reached the conclusion that we should reduce the gaz tax to make it equivalent to the value of compensating greenhouse gazes (about 350 million $ in comparison with revenus of more than 1 billion $) and increase tolls.
Another arugment was that tolls would a) increase bureaucracy and be costly and b) be diverted from road maintenance and used to finance any other governemental mission (Jean J. Samson, Le Journal de Québec among others). Those who read the study noticed that it took into account those two objections. First, the gross revenus from tolling has been reduced by 15 % to take into account perception costs and by another 5 % to take into account payment default. Then, the 1.6 billion revenu generated by tolls is a net revenu, not a gross revenus. Also, we proposed to bring back tolls in a PPP scheme to prevent the government from taking the new money and divert it from roads.

Tuesday, March 04, 2008

Suite au péage sur les routes | Follow-up on tolling Quebec's roads

La publication d'une Note économique sur le retour des péages au Québec a suscité beaucoup de réactions. Si la réaction est plutôt positive dans les médias francophones, elle l'est beaucoup moins dans les médias anglophones. Je passe donc les articles de nouvelles pour vous donner la référence de quelques éditoriaux disponibles en ligne pour vous permettre de participer à la réflexion:
Mario Roy dans La Presse: "Payer pour rouler"
"Ainsi, ce qu'il faut retenir au sujet de ce scénario en particulier, c'est qu'il doit être examiné sous l'angle de l'économie et des services.Le but n'est pas d'ouvrir un marché à l'entreprise privée. Le but n'est pas de financer les transports en commun - ce qui peut être fait par d'autres voies. Le but n'est pas de sauver la planète. Malgré cela, un système routier efficace à accès tarifé aurait certainement pour effet, à la fois, d'abaisser les émissions de carbone et de rendre plus attrayants les véhicules collectifs.En somme, ce ne serait pas de l'argent jeté par la fenêtre."
Jean-Marc Salvent dans Le Soleil: "Une voie à explorer"
Il ne suffit pas de dénoncer l’idée de l’IEDM pour croire que la lumière apparaîtra au bout du tunnel. Ceux qui s’y opposent devront nous dire comment payer l’entretien et la réfection de nos infrastructures routières sans alourdir sans cesse notre dette publique. Cette dette coûte cher.
Jean J. Samson dans le Journal de Québec: "La recette de la sauce"
La version en ligne n'était pas disponible au moment d'écrire ces lignes. L'éditorial est toutefois plutôt réfractère à l'idée d'un retour des péages. Je vous invite à le lire.
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The Economic Note published yesterday on the tolling plan for Quebec roads generated lots of reactions. I vonluntarily skip the news articles to refer you to some editorials published this morning. I must say that, while the reactions are generally positive in the French newspapers, they aren't in English newspapers.
An editorial from The Gazette: "Bridge tolls? Why not? Road tolls? No way!"
"Then there's the question of practicality. Tolling onto and off an island is fairly easy. Setting up and maintaining electronic-tolling hardware at every on- and off-ramp in the province would be much more costly. Nor do we trust that Quebec could start province-wide tolling but keep the exercise revenue-neutral. Quebecers are already taxed brutally; let's have no new province-wide taxes until the total tax burden starts coming down. We hope Quebec will authorize some form of bridge tolls for Montreal, which truly needs new revenue. But toll roads across the province are an idea whose time should simply never come."
Henry Aubin in The Gazette: "Tolls the wrong way to go"
"A better way than tolls exists - a higher gasoline tax. The province wouldn't have to hire a single extra person. It could just increase the existing tax enough to pay for public transit, as Tremblay wants, or for road work, as the MEI desires, or for both. The big complaint against such an idea is that Quebecers already pay enough taxes. Yet gas prices here are half of what they are in Europe. Bottled water is, as is often said, cheaper than gas."

Monday, March 03, 2008

Le retour des péages sur les autoroutes québécoises

( L'étude complète peut être consultée au www.iedm.org)
L’ampleur des travaux annoncés en février par le ministère des Transports (12 milliards $ de 2008 à 2012) suggère l’importance du manque d’entretien des infrastructures routières au cours des dernières années. En octobre dernier, l’IEDM publiait une Note économique afin d’expliquer l’efficacité des péages en ce qui a trait au financement du réseau routier[1]. En effet, on y démontrait qu’il s’agit du mode de perception qui respecte le mieux le principe de l’utilisateur-payeur.

Aucune route ni aucun pont ne font actuellement l’objet d’un péage au Québec, contrairement à la situation qui prévalait jusque dans les années 1980
[2]. Cela changera toutefois sous peu, avec le nouveau pont de l’autoroute 25 et le prolongement de l’autoroute 30. Le gouvernement a aussi laissé entendre que les péages prendraient une plus grande place dans un avenir proche[3].

Cette Note économique présente plus en détail quatre scénarios afin d’illustrer qu’un retour aux péages est réaliste soit a) sur les ponts de l’île de Montréal, b) dans la région métropolitaine de Montréal, c) dans un ensemble de régions urbaines ou d) sur la totalité des autoroutes principales du Québec. Dans tous les scénarios, on présume que le péage électronique sera employé puisqu’il s’avère peu coûteux et permet de minimiser les conséquences sur la fluidité de la circulation. La question de l’utilisation des fonds ainsi recueillis sera ensuite abordée.
[...]
Une approche « réseau » envers les péages

La conception d’un plan de péage est complexe et requiert une analyse approfondie. Les montants présentés dans ce document, bien que réalistes, ne devraient constituer qu’une approximation des revenus réels générés par le retour des péages sur le réseau autoroutier québécois. Une modélisation plus approfondie sera nécessaire pour en arriver à une décision éclairée.

Il convient d’insister sur le fait qu’une approche « réseau » est la plus équitable et la plus efficace sur le plan économique, car elle évite deux types d’interfinancement. Le premier est de nature géographique, c’est-à-dire lorsque les automobilistes d’une région paient pour un service reçu par les automobilistes d’une autre région. Par exemple, ne tarifer que les routes de la région métropolitaine ou des régions urbaines consisterait en un interfinancement des automobilistes du reste de la province ou des régions rurales si les sommes servaient à financer l’entretien de l’ensemble du réseau. Le deuxième est de nature sectorielle, lorsque les sommes recueillies par le péage servent à des fins autres que l’entretien et la réfection des routes. Par exemple, le versement des revenus des péages au transport en commun ou carrément au fonds consolidé équivaudrait à subventionner l’ensemble des contribuables avec des sommes soutirées aux automobilistes.

Il est souhaitable de concevoir le retour des péages dans une approche « réseau » et non seulement dans le cadre de la réalisation de projets particuliers. Ainsi, il serait logique d’étendre graduellement les péages sur toutes les autoroutes ayant un volume de circulation suffisant, comme cela se fait dans plusieurs pays
[1]. Afin de réduire le risque, de favoriser l’innovation et surtout pour éviter que l’État soit tenté de piger dans les recettes des péages à d’autres fins que l’entretien et la réfection des infrastructures, il serait souhaitable que les nouveaux péages soient mis en place sous forme de partenariats public-privé[2].
Le retour des péages se présenterait ainsi comme une solution au financement de l’entretien et de la réfection du réseau routier, ainsi qu’à la résorption du déficit d’entretien accumulé au cours des années.

[1] Pour une recension de différents modes et systèmes de péage en Europe, consulter : ASECAP, Les infrastructures à péage au sein de l’ASECAP, 2007 et Siemens Electronic Tolling, Road User Charging Schemes in Europe: Current Experiences and Future Trends, 2007. Pour l’expérience de l’État de Washington, consulter : Washington State Department of Transportation, Comparative Analysis of Toll Facility Operational Costs, 2007.
[2] Voir : Mathieu Laberge, Les réfections routières et les partenariats public-privé, IEDM, octobre 2007.
[1] Voir : Mathieu Laberge, Le péage comme solution au financement du réseau routier, IEDM, octobre 2007.
[2] Fred Nix, Alternative Road Financing Arrangements, 2001, p. 8.
[3] Denis Lessard, « Les péages vont se multiplier », La Presse, 19 octobre 2007, p. A-2.

Bringing back tolls on Quebec highways

(The complete study can be viewed at www.iedm.org)
The scope of roadwork announced in February by the Quebec Department of Transport ($12 billion from 2008 to 2012) suggests the extent to which the maintenance of highway infrastructure has been neglected in recent years. Last October, the Montreal Economic Institute published an Economic Note outlining tolls’ efficiency in financing the highway network.[1] The Note showed that this type of revenue collection best respects the user-pay principle.

No highway or bridge in Quebec is currently covered by tolls, unlike the situation that prevailed until the 1980s.
[2] This will soon change, however, with the new Highway 25 bridge and the extension of Highway 30. The government has also made it known that tolls would play a bigger role in the near future.[3]

This Economic Note presents four scenarios in greater detail to show that a return to tolls is realistic: a) on Montreal Island bridges; b) in the Montreal metropolitan area; c) in a group of urban areas; or d) on all of Quebec’s main highways. In each scenario, it is assumed that electronic tolls will be used since this costs less and minimizes disruption to traffic flow. We will then raise the issue of how the funds collected should be used.
[...]
A “network” approach to tolls

Designing a toll plan is complex and requires detailed analysis. The figures presented in this document, while realistic, should be seen only as an approximation of the real income generated by the return of tolls to the Quebec highway network. More detailed modelling will be needed to reach an enlightened decision.

It should be emphasized that a “network” approach is fairer and economically more efficient since it avoids two types of cross-subsidization. The first type is geographic, with motorists from one area paying for a service received by motorists from another area. For example, putting tolls only on roads in the Montreal area or in urban areas generally would amount to cross-subsidizing motorists in the rest of the province or in rural areas if the amounts collected were used to finance maintenance of the entire network. The second is sectorial in nature, with the amounts collected in tolls being used for purposes other than the maintenance and rebuilding of roads. For example, paying toll income to public transit or straight into the consolidated fund would be equivalent to subsidizing all taxpayers with money taken from motorists.

It is better to take a “network” approach to the return of tolls rather than linking it to the completion of particular projects. It would thus be logical to extend tolls gradually to all highways with sufficient traffic volume, as is done in a number of countries.
[1] To lower risk, to promote innovation and, above all, to avoid the government being tempted to reach into toll revenues for purposes other than maintaining and rebuilding infrastructure, it would be desirable for new tolls to be set up in the form of public-private partnerships.[2]
[1] To look into the various forms and systems of tolls in Europe, consult ASECAP, Tolled infrastructures within ASECAP, 2007, and Siemens Electronic Tolling, Road User Charging Schemes in Europe: Current Experiences and Future Trends, 2007. For Washington State’s experience, consult Washington State Department of Transportation, Comparative Analysis of Toll Facility Operational Costs, 2007.
[2] See Mathieu Laberge, Road repairs and public-private partnerships, Montreal Economic Institute, October 2007.
[1] See Mathieu Laberge, Tolls as a solution for financing the road network, Montreal Economic Institute, October 2007.
[2] Fred Nix, Alternative Road Financing Arrangements, 2001, p. 8.
[3] Denis Lessard, “Les péages vont se multiplier”, La Presse, October 19, 2007, p. A-2.

Saturday, March 01, 2008

Entendu au budget | Heard at the budget

La semaine dernière, j'ai participé au huis clos du budget fédéral à Ottawa. C'est un passage obligé de chaque budget, tant fédéral que provincial: on embarre les experts en politiques publiques de tous le pays pour pouvoir leur remettre d'avance les documents du budget sans que ceux-ci ne se retrouvent dans les médias avant le dépôt devant les députés. Or, dans ces huis clos, on mêle tant les spécialistes des associations professionnelles (lire des lobbies) que les experts et chercheurs de centres indépendants.
Comme l'attente de la levée de l'embargo fini toujours par être un peu longue et franchement endormante, on se prend rapidement à entendre les discussions environnantes. Voici quelques bribes anonymes entendues lors du huis clos:
Deux "experts" discutent à l'entrée du huis clos:
- Alors, quelles sont vos attentes cette année?
- On espère que le fonds de la taxe sur l'essence va être assuré de façon permanente... et vous??
- Oh! Comme à chaque année: on veut plus d'effectifs et des ressources pour le recrutement.
À la sortie de la salle, les deux mêmes quidams:
- Et puis? Content? Vous avez eu le fameux fonds!
- Ouais, mais on aurait préféré des investissements directs dans le fond... et de votre côté?
- Satisfaisant... encore une bonne année!
Cette discussion, et bien d'autres, m'ont étonnament rappelé le discours tenus par des enfants la veille et le lendemain de Noël... À chacun sa liste!
Tout cela pour dire que ce budget a été habile, néanmoins. Il a permis de ne pas insatisfaire grand monde tout en gardant un contrôle très serré des dépenses et en évitant le saupoudrage auquel Paul Martin avait habitué les canadiens. C'est prudent... plus en tout cas que tout ceux qui réclament une intervention musclée du gouvernement.
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Last week, I went to Ottawa to comment the federal budget 2008. It's now a tradition for every budget, federal as provincial: we get locked up with most public policy's specialists and read in advance the budget's documents. All "specialists" are locked up together, from the professionnal association (here, read lobbies) and from independent research centers and institutions.
As the waiting time for the lock-up to end gets longer, we get more and more tired and bored. So, it is very tempting to hear to other conversations being held around. Here are a few parts of a discussion heard in Ottawa:
Two specialists before entering the lock-up:
- So... what are you waiting for this year?
- We hope the gaz tax fund to be made permanent... and you?
- Oh! Business as usual: we hope for new people and new resources for recruiting!
Getting out of the lock-up, the two same people:
- And... you must be satisfiedL you had the fund?
- Yes... but we'd have prefered direct investments for this year... What about you?
- Statisfied... a good year once again!
This reminded me children on Christmas' eve and on december 26th!
Anyway, all that to say it is a fairly good budget whatever everybody say. It made only a few people unsatisfied while controlling efficiently public expenses and avoiding giving a few million dollars to every possible program as Paul Martin did in the past. It is a quite safe startegy... more than people asking for strong governmental intervention at least!