Friday, May 14, 2010

Contribution santé: ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain

voici un texte que j'ai publié aujourd'hui sur cyberpresse
Dans les suites du budget Bachand, on a fait grand cas du caractère régressif de la contribution santé, ce montant forfaitaire qu'une grande majorité de Québécois devront payer pour financer les services de santé. Profitons de l'accalmie sur ce front pour faire le point froidement sur cette nouvelle perception fiscale tant décriée. D'autant plus que ses impacts les plus importants pourraient bien être positifs... et n'avoir que peu à voir avec la progressivité du système fiscal québécois.

Vraie, la contribution santé est régressive. Mais elle ne constitue qu'une mesure fiscale dans tout un système qui atteint généralement bien ses objectifs de redistribution. Le coefficient de Gini permet d'évaluer l'égalité de la distribution des revenus: plus il est bas, plus les revenus sont distribués également. Pour une famille québécoise de deux personnes avec deux enfants, le coefficient de Gini du revenu après impôts (et transferts) est 25% inférieur à celui du revenu de marché (avant impôts et transferts). Pour les personnes seules, cet écart est encore plus important. C'est donc dire que le système fiscal québécois contribue à redistribuer la richesse. Cette redistribution se fait même mieux ici qu'ailleurs au Canada.

La contribution santé ne changera pas fondamentalement les sources de financement du système de santé non plus. Avant l'implantation de la franchise, les impôts représentaient 53% du financement de la santé, les taxes à la consommation représentaient 25% de celui-ci et les autres revenus autonomes représentaient 22%. Après l'implantation de la contribution, la part respective de chacune des perceptions fiscales précédentes aura passé à 51%, 25% et 21%. La contribution ne représentera que 3% des coûts du système de santé.

Les vrais changements seront plus fondamentaux
Les apports majeurs de la contribution santé sont donc tout autre. Ceux-ci pourraient d'ailleurs modifier fondamentalement et positivement notre façon de concevoir le financement des services de santé.

D'abord, les sommes perçues en vertu de cette contribution seront dédiées au financement des institutions de santé. Cette façon de faire est en quelque sorte une assurance de traçabilité pour le contribuable: il pourra savoir ce qui advient de ce qu'il a payé. Si les sommes ne sont pas utilisées à bon escient, il pourra également sanctionner le gouvernement qui aura éventuellement manqué à cet engagement. Actuellement, peu d'autres formes de perception fiscale donnent une telle transparence puisque leurs recettes sont versées au fonds consolidé, le «compte bancaire avec opération» du gouvernement québécois.

De plus, le financement accru provenant de la contribution santé sera redistribué aux institutions en fonction de leur productivité et de leur atteinte de résultats. Cela fera en sorte que les institutions de santé qui ont innové pour améliorer leur gestion et mieux performer seront récompensées. On peut espérer qu'il y aura donc une «course à l'amélioration» entre les centres hospitaliers pour mettre la main sur ce nouveau financement. À terme, l'innovation qui en découlera profitera à tout le réseau puisque les meilleures pratiques de gestion seront ainsi valorisées.

En somme, on aura beau rouspéter contre cette nouvelle perception fiscale et son caractère régressif, il faut bien reconnaître qu'elle a aussi des éléments positifs pour les contribuables. Elle permettra une meilleure transparence dans le financement de nos institutions de santé, une meilleure reddition de compte de nos élus et une émulation sur les meilleures pratiques de gestion des centres hospitaliers. Pour toutes ces raisons, il faudrait donc l'aborder froidement et éviter de jeter le bébé avec l'eau du bain.

Monday, February 01, 2010

Les baby-boomers: source du problème ou partie de la solution?


Bien que la plupart des économies occidentales seront touchées par un vieillissement de leur population, celle-ci sera plus rapide au Québec que dans les autres provinces canadiennes et que dans plusieurs pays occidentaux.

D’ici 2012, plus de 700 000 emplois devront être comblés au Québec. Au même moment, la population de 20 à 64 ans commencera à diminuer à mesure que les baby-boomers vieilliront. C’est donc dire qu’alors que de nombreux emplois seront disponibles, les travailleurs pour les combler seront de plus en plus rares.
Les conséquences de cette diminution du nombre de travailleurs sont nombreuses. Avec moins de travailleurs, il sera plus difficile de maintenir le niveau de croissance économique de la province. De fait, on prévoit que la croissance économique pourrait passer en dessous de sa moyenne historique au cours des prochaines années. Cela implique une stagnation, voire une lente diminution, du niveau de vie des Québécois. Les finances publiques s’en ressentiront également : si rien n’est fait, on prévoit des déficits structurels croissants d’ici à 2020. Et c’est sans compter les déficits conjoncturels découlant de la récession de 2008-2009.
Pas de solution miracle
Plusieurs solutions ont été avancées pour faire face au déclin du nombre de travailleurs au Québec. Par exemple, une hausse de la productivité de la main d’oeuvre pourrait contribuer à contrer l’effet négatif de cette diminution sur la croissance économique. Néanmoins, il est peu probable que la hausse de la productivité soit suffisante pour contrebalancer complètement l’effet du vieillissement de la population1.
De même, la hausse du niveau d’immigration pourrait constituer une réponse partielle au problème de diminution du nombre de travailleurs québécois. Celle-ci ne pourrait toutefois répondre entièrement au problème étant donnée l’existence de barrières à la mobilité de la main d’oeuvre et la nécessité d’assurer l’intégration des nouveaux arrivants sur le marché de l’emploi.

Finalement, la hausse de la natalité est une solution envisageable, mais à long terme uniquement. De fait, les enfants nés en 2010 n’intégreront le marché de l’emploi qu’entre 2025 et 2030. Étant donné l’imminence du déclin du nombre de travailleurs, la hausse de la natalité est donc une option imparfaite.
Accroître la participation des aînés au marché de l’emploi
Une dernière solution mérite d’être considérée. Il s’agit d’augmenter la participation des personnes de 55 ans et plus au marché du travail.

À l’heure actuelle, l’âge moyen de la retraite des Québécois est de 59 ans pour les femmes et de 61 ans pour les hommes. Cela est plus tôt que l’âge moyen de la retraite des Ontariens. De même, une plus faible proportion des Québécois de 55 ans et plus sont actifs sur le marché de l’emploi. Le taux d’activité des Québécois diminue d’ailleurs rapidement avec l’âge à partir de 50 ans.

Pour compenser complètement l’effet du vieillissement de la population sur la croissance économique, on estime qu’il faudrait pratiquement doubler le taux d’activité des personnes de 60 à 64 ans et augmenter celui des personne de 65 ans et plus. Alternativement, on pourrait tenter d’accélérer la tendance à la hausse du taux d’activité des personnes âgées et des femmes.

Il va sans dire que cette solution doit être appliquée de concert avec celles abordées précédemment. Pour lui assurer une chance minimale de succès, elle doit également s’implanter sur une base volontaire : on doit permettre aux gens qui le souhaitent de pouvoir travailler plus longtemps et non les obliger à le faire.
Cela passe notamment par des clauses de retraites plus souples au niveau des fonds de retraite, par une fiscalité qui encourage le maintien en emploi et la retraite progressive, par une lutte aux préjugés qui touchent les travailleurs âgés ainsi que par une meilleure coordination des programmes de réinsertion offerts aux personnes du troisième âge.
Pour y arriver, il faudra que les associations patronales, les syndicats, les associations professionnelles et l’État Québécois collaborent pour lever les freins au maintien et au retour en emploi des personnes âgées. Plusieurs pays ont adopté le virage du « vieillissement actif ». Dans les cas couronnés de succès, c’est la concertation et la mobilisation de l’ensemble des acteurs concernés qui a permis d’arriver à un résultat.
Pour de plus amples renseignements, veuillez consulter le rapport de projet à l’adresse suivante :
http://www.cirano.qc.ca/pdf/publication/2010RP-01.pdf

Sunday, January 31, 2010

BABY-BOOMERS: SOURCE OF THE PROBLEM OR PART OF THE SOLUTION?

While much of the western world will experience an aging of the population, Quebec will be affected sooner than other Canadian provinces and many developed nations.

There will be 700 000 jobs to fill in Quebec by the year 2012. At the same time, the population aged 20 to 64 will begin to shrink as baby boomers age. This means that, while there will be many jobs, the workers required to fill them will be in short supply.

This decline in the number of workers has a number of consequences. It will be difficult to sustain the province's growth rate with fewer workers. In fact, we foresee the rate of growth of the economy dropping below its historic mean in the next few years. This implies a standard of living for Quebeckers that is stagnating, even declining. Government finances will also feel the pinch: If nothing is done, forecasts are for burgeoning structural deficits leading up to 2020, not to mention cyclical deficits resulting from the recession of 2008–2009.
No panacea
Several solutions have been proposed to counteract the fallout of the decline in the number of workers in Quebec. Increasing immigration could provide a partial response to the problem of Quebec's shrinking workforce. However, barriers to labour mobility and the need to integrate new arrivals into the labour market undermine the potential contribution of this avenue.

Finally, a higher birthrate might offer a solution, but only in the long term. Children born in 2010 will only enter the labour market between 2025 and 2030. In light of the imminence of the labour shortage, this option is of little help.

Increasing the participation of the elderly in the labour market
Finally, one more solution that merits consideration is boosting the labour market participation rate of individuals aged 55 and older.

Currently, the average retirement age in Quebec is 59 years for women and 61 for men. This is younger than the corresponding value for Ontario. Similarly, a smaller proportion of Quebeckers aged 55 and over are active on the labour market. The labour force participation rate of Quebeckers falls off rapidly as of age 50.

In order to completely offset the impact of the aging population on economic growth, we estimate that it would be necessary to virtually double the participation rate of individuals aged 60 to 64 while raising the rate of those aged 65 and over. Alternatively, would could strive to accelerate the upward trend in the participation rate of the elderly and of women.

Clearly, this solution must be implemented in conjunction with the previously mentioned measures. To ensure at least a modicum of success, implementation must also rely on voluntary participation: We must smooth the path for those who wish to work longer; not coerce the participation of the unwilling.

Specific initiatives could include more flexible retirement provisions at the level of pension funds, a tax system that rewards staying at work and progressive retirement, measures to combat prejudices against older workers, and a better coordination of reintegration services offered to the elderly.

To achieve this, it will be necessary for employers' organizations, unions, professional associations, and the government of Quebec to join forces to dismantle the barriers in the path of the elderly seeking to stay at work or return to work. Several countries have already embraced the paradigm of "active aging." Where those efforts have been crowned with success, it has been credited to the coordination and mobilization of all affected players.
For more information, please consult the project report link:
http://www.cirano.qc.ca/pdf/publication/2010RP-01.pdf